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Publié le par Groupe Révoltes
Publié dans : #Italie, #Europe

Élections régionales en Italie : l’absence de parti d’origine ouvrière impuissante le prolétariat

On votait en Italie les 28 et 29 mars dernier dans 13 régions sur 20. Les partis bourgeois au pouvoir ont fait mieux que résister : ils conquièrent 4 régions : la Calabre mais aussi et surtout la Campanie (Naples), le Piémont (Turin) et le Latium (Rome), tout en conservant la Lombardie et la Vénétie. Les coalitions dites de «centre- gauche » conservent 7 régions dont l’Emilie Romagne, la Toscane et les Pouilles.

Le mécontentement social, marqué par de nombreuses et massives manifestations ne s’est pas traduit par un vote sanction contre le gouvernement de Berlusconi.

Certes, l’abstention progresse de 8 % et atteint 37 %, un record dans un pays où le vote était obligatoire il y a peu, et où la participation a toujours été élevée, mais elle ne profite pas aux partis de « centre-gauche. Cette abstention traduit une absence de perspective politique.

Nouvelle progression de la Ligue du Nord

Cette radicalisation des partis bourgeois était déjà perceptible dans les débats précédant les élections.

Mais, surtout, il importe de noter le rééquilibrage et la restructuration sociale qui s’opèrent au sein de ces partis.

Le parti de Berlusconi (le peuple de la liberté - PdL) arrive en tête avec 26,7 %, mais il est en recul, tant en nombre relatif (- 9 % par rapport aux européennes de 2009, - 11 % par rapport aux législatives de 2008) qu’en valeur absolue (1 million de voix en moins par rapport aux régionales de 2005).

La Ligue du Nord est le seul véritable parti bourgeois gagnant du scrutin : sur les 13 régions, elle progresse de 5,7 % à 12,3 % entre 2005 et 2010 et gagne 1,5 million de voix malgré la progression de l’abstention.

Dans le Nord du pays, elle arrive largement en tête en Vénétie (31,15 %) doublant son nombre de voix, et remporte la région. Elle talonne le PdL en Lombardie (26,20 %), elle devient la 3ème force dans le Piémont (16,74 %). Elle atteint 13,67 % en Emilie-Romagne, rouge, dans laquelle le Parti Communiste Italien faisait généralement ses meilleurs scores.

En fait, la Ligue du Nord a su constituer un bloc alliant le petit patronat, les artisans, les commerçants, mais également soutenue par une frange importante des salariés dans un même rejet de L’Etat bourgeois italien comme des étrangers. Il s’agit certes de diviser le prolétariat entre travailleurs italiens et étrangers, en utilisant les symboles les plus immondes (des militants de la Ligue ont ainsi distribué pendant la campagne du savon liquide sur un marché en invitant les gens à l'utiliser pour se laver après avoir touché des immigrants), voire en multipliant les intimidations physiques.

Mais cela n’a rien à voir avec le Front National qui regroupe les éléments les plus décomposés de la petite bourgeoisie française. La Ligue du Nord contrôle nombre de municipalités, y compris des grandes villes, et dispose du soutien d’une partie de la bourgeoisie des régions les plus riches de l’Italie du Nord.

Cela traduit aussi la division persistante de la bourgeoisie italienne et des difficultés de Berlusconi à l’unifier pour mieux porter des coups à son prolétariat, et surtout ses propres difficultés : un rapport de la Banque d’Italie indiquait ainsi fin 2009 que l’industrie italienne était revenue « 25 ans en arrière », sous l’effet de la crise financière et de l’exacerbation de la concurrence internationale. Dans une situation si précaire, la bourgeoisie ne peut être qu’amenée à se radicaliser.

Disparition des partis ouvriers-bourgeois

Mais cette radicalisation ne pourrait s’effectuer ainsi sans prendre en compte les conséquences de ce qui n’est ni plus ni moins qu’une quasi disparition des partis ouvriers-bourgeois en Italie.

Berlusconi en effet était en difficulté : des oppositions importantes se manifestent devant l’intensité des attaques menées contre le monde du travail (dernier en date : remise en cause des conventions collectives).

On aurait pu penser que la gauche parlementaire (le parti démocrate) avait un boulevard devant elle lors de ces élections. En réalité, elle s’est effondrée : elle a perdu le quart de ses voix, soit 5 points et 2 millions de voix en moins qu’en 2005.

Le « centre-gauche » s’est gardé d’aborder les sujets de fond dans la campagne, quitte à alimenter l’abstention des masses. En effet, on tenterait vainement de trouver un sujet où il se soit opposé au gouvernement et ait combattu en défense des intérêts ouvriers.

Et pour cause : le « centre-gauche » est principalement composé du Parti Démocrate (PD), qui est le fruit de la fusion « contre-nature » entre les principaux héritiers de l’ancien Parti Communiste Italien (ex-PCI, devenu PDS puis DS), et une aile de l’ancienne Démocratie-Chrétienne qui avait dirigé le pays durant tout l’après-guerre. Avec l’objectif clairement affiché de dissoudre le caractère ouvrier du PCI dans un Parti Démocrate à l’américaine.

En définitive, c’est l’extrême droite et surtout la Ligue du Nord qui finit par incarner l’opposition ou des « personnalités de gauche » comme le juge Antonio de Pietro (devenu célèbre lors de l’opération « Mani Pulite »), mais sans lien avec les organisations ouvrières. Alors que le capital parvient à canaliser le vote des travailleurs en colère vers des voies de garage, le PD continue sa fuite en avant vers le centre bourgeois.

Il convient de rappeler que le PD est principalement issu de l’ancien appareil du PCI, recyclé en PDS, puis DS (démocrates de gauche), avant de fusionner avec une frange de la Démocratie chrétienne dans un Parti démocrate à l’américaine. Ainsi se termine 20 ans de liquidation du PC en Italie.

Mais avec la création du Parti Démocrate, c’est aussi la disparition du principal parti ouvrier-bourgeois et donc la possibilité pour le prolétariat d’exprimer un vote de classe. Si cette situation devait persister, ce serait une véritable rupture historique pour le prolétariat italien qui a joué un rôle majeur dans la lutte des classes durant le XXème siècle.

Les communistes en voie de liquidation ?

Les 2 partis qui ont conservé une référence communiste, le Parti de la Refondation Communiste (PRC) et le Parti des Communistes Italiens (PDCI) enregistrent une véritable défaite. Ils ont fait le choix de se présenter ensemble sous la bannière d’une coalition dénommée « Fédération de la Gauche ».

Cette dernière atteint péniblement 2,8 % des voix !

En 2005, le PRC avait obtenu 5,6 % et le PDCI 2,6 % : le recul est de 1,3 million de voix par rapport aux Européennes de 2009, le recul est de 300.000 voix sur la liste PRC-PDCI.

Les communistes sous l’étiquette « Fédération de Gauche » ne dépassent la barre des 5 % qu’en Toscane (5,3 %) et en Ombrie (6,9 %). Ailleurs, leur score ne dépasse pas les 4 %.

Ainsi se termine 20 ans de liquidation du PC en Italie, conséquence prévisible en raison de politiques qui n’ont eu de cesse de jouer tantôt l’opportunisme, tantôt la division, mais qui sont restées imperturbablement révisionnistes, dans la continuité de l’appareil stalinien.

Le bilan à tirer de ces élections est que lorsque la classe ouvrière n’a même plus de parti ouvrier bourgeois à utiliser contre la bourgeoisie, c’est la bourgeoisie qui se maintient au pouvoir. Les travailleurs ne peuvent certes pas avoir confiance dans les partis ouvriers bourgeois ; ils auront à constituer leurs propres organisations, une organisation révolutionnaire. Mais en attendant, ils se servent de leurs organisations traditionnelles, comme le PS et le PCF en France. Les orientations de liquidation du Parti socialiste pour le fusionner, qui d’un temps avec le Modem (projet Royal) ou avec d’autres organisations bourgeoisies étrangères au mouvement ouvrier, sont à combattre. Nous sommes pour la défense inconditionnelle des organisations ouvrières traditionnelles contre toute tentative de dissolution dans un parti bourgeois, comme en Italie.

Aujourd’hui en Italie, les travailleurs doivent combattre pour que les fractions ouvrières du PD quittent ce parti bourgeois et s’allient avec ce qui reste des partis communistes pour combattre la politique du gouvernement Berlusconi.

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