Le blog du groupe Révoltes

Pour la construction d’un Parti Ouvrier Révolutionnaire et d’une Internationale Ouvrière Révolutionnaire

Publié le par Groupe Révoltes
Publié dans : #Europe, #Allemagne
Le 23 septembre dernier, les élections législatives en Allemagne ont donné lieu à une victoire incontestable de la CDU d’Angela Merkel et de son allié bavarois (la CSU), et plus largement, à une nouvelle progression des partis de la bourgeoisie allemande.

Avec une participation globalement stable par rapport aux élections précédentes de 2008, la CDU/CSU gagne plus de 3,5 millions de voix ; avec 41,6% des suffrages, elle atteint son meilleur score depuis 1994. Elle arrive en tête dans la quasi-totalité des circonscriptions, et d’après les sondages, dans toutes les classes d’âges, et dans toutes les catégories socioprofessionnelles, à l’exception des chômeurs.

Partis

2013 (Voix)

%

2009 (Voix)

%

Évolution (voix)

Évolution %

CDU/CSU

18 157 256

41,6

14 658 515

33,8

+ 3 498 741

+7,8

FDP (Libéraux)

2 082 305

4,8

6 316 080

14,6

- 4 233 7755

-9,8

SPD

11 247 283

25,8

9 990 488

23,0

+ 1 256 795

+2,8

Verts

3 690 314

8,5

4 643 272

10,7

- 952 958

-2,2

Die Linke

3 752 577

8,6

5 155 933

11,9

- 1 403 356

-3,3

AFD

2 052 372

4,7

-

-

+ 2 052 372

+4,7

Autres

2 619 117

6,0

2 606 902

6,0

+ 12 215

-

Mais ce succès s’effectue en partie au détriment de ses alliés, les libéraux du FPD.

 

La crise de l’euro vient faire exploser le FDP

 
Le parti libéral, le FDP, allié traditionnel de la CDU/CSU et aiguillon traditionnel du capital financier s’est effondré, et pour la première fois depuis la guerre ne parvient pas à franchir la barre des 5% des suffrages nécessaires à l’obtention de députés au Bundestag.

Cette débâcle est certes le résultat d’un enchaînement bien particulier pour le FDP. En 2009, il obtient un score exceptionnellement élevé, pour des raisons indirectes : afin d’empêcher une reconduction de la grande coalition (CDU/CSU et SPD) qui avait dirigé le pays entre 2005 et 2009, la bourgeoisie avait voté en masse pour le FDP afin que celui-ci soit assuré de franchir le seuil des 5% (qu’il avait systématiquement franchi depuis la guerre), et que le FDP puisse remplacer le SPD au sein de la coalition gouvernementale.

Si l’objectif est atteint – le FDP récolta 14,6% des voix contre 7 à 10% en moyenne aux élections précédentes - la coalition entre le FDP et la CDU/CSU ne cessera d’afficher des positions divergentes, moins sur le fond que sur le rythme et la méthode des réformes. La divergence la plus commentée concernait la politique fiscale : malgré la crise, le FDP à peine de retour au gouvernement ne cessera de réclamer des baisses d’impôts, notamment pour ses électeurs aisés, alors que parallèlement la CDU/CSU a mis la réduction des déficits au centre de sa politique européenne. Très vite, accumulant divergences, maladresses et soupçons de corruption, le FDP accumule les scores médiocres au cours des élections régionales, en perdant plus de 6 parlements régionaux entre 2009 et 2012.

Cependant, au-delà de questions de forme, cet effondrement est bien lié aux divergences grandissantes au sein de la bourgeoisie allemande sur l’euro, sur les politiques monétaires et européennes. Le crash progressif du FDP est en effet parallèle à la crise de la monnaie unique, face à laquelle la bourgeoisie allemande s’est profondément divisée sur la meilleure politique à mener.

Si la CDU/CSU et le FDP n’ont pas eu la détermination ni les moyens politiques d’assumer les conséquences potentiellement ravageuses d’une sortie de la monnaie unique, des pans de plus en plus importants du capital financier allemand ont manifesté, toujours plus ouvertement, leur opposition à la poursuite de la politique de soutien à la monnaie unique. En juillet 2011, dans une « Déclaration de Berlin » 200, chefs d’entreprise familiales employant 200.000 salariés protestent contre ce qu’ils jugent une « politique irresponsable d’endettement » ; un an plus tard, ce sont 150 économistes qui protestaient publiquement contre l’approbation du MES (Mécanisme Européen de Stabilité). Certains d’entre eux avaient introduit des recours, sans succès, devant le Tribunal Constitutionnel de Karlsruhe.

Ces oppositions se manifestent également au sommet des institutions financières allemandes : le délégué allemand à la BCE, Jürgen Stark avait démissionné en 2011 ; même chose pour le gouverneur de la Bundesbank (Axel Weber), tandis que son successeur, Jens Weidmann, n’y est resté que sur « intervention personnelle de la chancelière ». Tous rejettent ouvertement la politique de rachats d’obligations d’État par la BCE.

 

L’irruption d’Alternative für Deutschland

 

La fondation du nouveau parti « Alternative für Deutschland » en février 2013, qui place au cœur de son programme le retour aux monnaies nationales (ou à un « euro du nord ») constitue l’aboutissement politique de ces oppositions. La parti provient sans ambiguïté du cœur de la bourgeoisie allemande : parmi ses membres fondateurs, on trouve Bernd Lucke, professeur d’économie à l’Université de Hambourg ; Konrad Adam, éditorialiste dans des journaux conservateurs (Frankfurter Allgemeiner Zeitung), ou encore Hans-Olaf Schenkel, ancien dirigeant du BDI, une des deux principales unions patronales allemandes – et ancien membre du FDP !

Bien que ne comptant que quelques mois d’existence, l’AfD manque aussi de peu l’entrée au Parlement avec un score de 4,7% presque identique à celui du FDP. Ses scores sont plus importants dans les zones de force des libéraux à l’ouest de l’Allemagne, notamment dans les faubourgs aisés de Francfort, Mannheim ou Karlsruhe, mais c’est dans l’Est de l’Allemagne que ses scores sont les meilleurs, notamment en Saxe (région de Leipzig et Dresde) où les partis d’extrême-droite réalisent traditionnellement leurs meilleurs scores. Sa montée en puissance, si elle devait se confirmer, rendrait la situation politique particulièrement instable en dynamitant le jeu d’alliances traditionnel au sein des partis de la bourgeoisie allemande.

 

Le SPD continue à payer sa prise en charge des réformes anti-ouvrières

 

Le SPD, le parti-social démocrate allemand, regagne certes quelques suffrages – 1,2 millions de voix supplémentaires - mais avec 11 millions de voix, il demeure très loin de son score de 2005 (16 millions de voix), et presque encore inférieur de moitié au score de 1998 (20 millions de voix) qui avait permis l’arrivée de Gerhard Schröder au poste de chancelier. De piètres résultats qui sont pourtant la conséquence logique de la candidature de Peer Steinbrück, proche de Schröder et ancien ministre des Finances de la grande coalition (2005-2009).

Depuis 1945, le SPD n’aura gouverné au niveau fédéral que durant les années 70, au sein de coalitions sociales-libérales… avec le FDP. Et en 1989, alors que le mouvement des masses met à bas le régime stalinien à l’Est de l’Allemagne, le SPD, sous la direction d’Oskar Lafontaine, se prononce contre la réunification, s’aliénant durablement le soutien des Allemands de l’Est, et offrant un boulevard à la CDU, qui depuis lors reste solidement ancrée à l’Est.

Aussi lorsque le SPD remporte les élections fédérales en 1998, il s’agit d’un événement majeur. Mais la coalition de front populaire qui se met en place (SPD/Verts) sous la direction de Schröder aura un rôle politique tout autre que celui pour lequel il a été élu : il s’agira de prendre en charge la crise du capitalisme allemand, affaibli par les coûts de la réunification, la montée du chômage et la force des acquis de son prolétariat. Sous sa direction, la mise en place de « l’Agenda 2010 » en 2003 (et notamment les lois Hartz) liquide l’assurance-chômage et des pans entiers du droit du travail, ouvrant la voie à une profonde dégradation des conditions de travail du prolétariat allemand, notamment pour les travailleurs non qualifiés contraints de travailler pour des salaires de misère (qualifiés en Allemagne de « Hungerlohn », soit de « salaire de la faim »). Ainsi en 2011, plus de 7 millions de travailleurs étaient payés moins de 8,50€ brut de l’heure (soit moins que le SMIC français), dont 4,5 millions touchaient moins de 7€ brut, et 1,8 millions moins de 5€ brut ; pour beaucoup d’entre eux, les cotisations retraites n’étaient pas incluses, ou à un niveau dérisoire… Un véritable « servage » que les travailleurs ne peuvent même plus refuser sous peine de perdre ce qui reste d’allocation chômage (le fameux « Hartz IV » plafonné à 374€ pour un célibataire) ; en 2012, plus d’un million de chômeurs allemands ont ainsi été financièrement sanctionnés !

 

En 2003-2004, Schröder avait réussi à mater la contestation interne au sein des syndicats et du SPD (un congrès extraordinaire avait dû être convoqué sous la pression des militants), puis le mouvement des masses initié à l’Est, particulièrement touché par la liquidation de l’assurance-chômage : les « Montagsdemo » (« manifestation du lundi ») rassembleront jusqu’à 200.000 personnes, avant de refluer en l’absence de débouché politique. Mais le SPD en ressortira exsangue : il perdra en quelques années plusieurs centaines de milliers d’adhérents, ainsi que sa majorité au Bundesrat suite à la défaite historique en 2005 du SPD dans le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie (comprenant ses fiefs ouvriers de la Ruhr), dirigé par Peer Steinbrück fervent partisan de l’Agenda 2010.

Depuis 2011, aux élections locales, on pouvait toutefois observer une certaine remontée du SPD, en particulier dans ses zones de force du Nord de l’Allemagne, vote de protestation contre Merkel. Il regagne une majorité dans plusieurs Länder (Hambourg, Schleswig-Holstein, Basse-Saxe), et très symboliquement dans le Land de Rhénanie-du-Nord Westphalie en 2012.

 

C’est dans ce cadre qu’il faut interpréter la candidature aux élections fédérales de Steinbrück en 2013 (après celle de l’ancien bras droit de Schröder, Steinmeier, en 2009). L’appareil du SPD, qui assume ouvertement et complètement la politique des « réformes » menées par Schröder, cherche à barrer la route à toute tentative du prolétariat de se mobiliser sur le plan électoral. Steinbrück, au-delà de son rôle de garant fidèle et constant des intérêts de la bourgeoisie au sein du SPD, n’a pas hésité à saborder de bout en bout la campagne (il fut ainsi surnommé « le problème »), en finissant sur une de ses dernières couvertures de magazine par un doigt d’honneur - adressé à qui si ce n’est à la classe ouvrière - afin de bien lui signifier de ne pas utiliser le SPD comme outil pour chasser Merkel ? Ayant obtenu un score médiocre dans sa propre circonscription (34%, contre 49% à la CDU), il n’attendra pas 3 jours pour démissionner de ses responsabilités au sein du SPD comme du Parlement, une fois le sale boulot effectué.

Malgré la candidature de Steinbrück, le SPD progresse néanmoins légèrement en voix (1,2 millions de voix supplémentaires), mais essentiellement à l’ouest et dans les circonscriptions du nord de l’Allemagne où il est le plus implanté. Ainsi dans la Ruhr, il dépasse à nouveau le plafond des 40% des voix dans la plupart des circonscriptions, seuil qu’il n’avait pu franchir en 2009 – mais il en rassemblait traditionnellement plus de 50%...

La situation est pire à l’Est, où ses positions déjà faibles (15 à 25%) enregistrent un nouveau recul. Pour de nombreux travailleurs, et particulièrement à l’Est, pour tous ceux qui ont enduré l’incroyable recul provoqué par l’Agenda 2010, il est devenu impossible de voter pour le SPD.

Die Linke recule aussi

 

En 2009, die Linke avait rassemblé plus de 5 millions de voix, obtenant de loin son meilleur score, en ayant réussi à maintenir ses scores traditionnellement élevés à l’Est avec une forte progression à l’Ouest, notamment dans les circonscriptions ouvrières - dans la Ruhr, en Sarre, à Brême ou Hambourg. Rien de tel cette fois-ci : malgré la faiblesse persistante du SPD, die Linke recule partout et perd le quart de ses voix, tant à l’Est qu’à l’Ouest. Car comme pour le SPD, mais pour d’autres raisons, die Linke demeure un véritable repoussoir en raison de ses origines.

Die Linke est en effet constitué d’un regroupement sans principe entre deux branches. La première, c’est le PDS, qui n’est autre que la continuité de la SED, l’ancien parti unique stalinien qui a dirigé la RDA. Loin d’être issu du mouvement ouvrier, le PDS est à l’inverse, issu de la destruction du mouvement ouvrier à l’Est de l’Allemagne par la bureaucratie stalinienne après 1945, et notamment la liquidation – parfois physique – de militants syndicaux et du SPD s’opposant à la politique de Staline. Après la réunification, le PDS a joué un rôle majeur dans la réintroduction du capitalisme à l’Est, ses cadres ayant participé notamment à conduire les privatisations pour le compte de la bourgeoisie allemande. Sur le plan électoral, le PDS n’a donc logiquement jamais percé à l’Ouest, et alors en perte de vitesse, le PDS est exclu du Bundestag suite aux élections de 2002 (ne réunissant que 4% des voix).

La deuxième branche est issue de l’organisation « WASG », créée en 2004 par quelques cadres moyens de la bureaucratie syndicale à l’Ouest, ayant quitté le SPD suite à la mise en place de l’Agenda 2010. Demeurée faible numériquement en raison d’une ligne politique sans issue (comment recréer une « bonne » social-démocratie en lieu et place du SPD ?), elle échoue à percer aux élections régionales de Rhénanie du Nord – Westphalie au printemps 2005, et se résout, pour des questions techniques liées à la loi électorale allemande, à se présenter sur des listes du PDS aux élections de septembre 2005, sous l’impulsion d’Oskar Lafontaine. Le résultat est arithmétiquement satisfaisant (un score de 8,7%) et les deux organisations engagent leur fusion au sein de « Die Linke », qui aboutira en 2007. Mais c’est aussi un suicide politique pour les militants ouvriers de WASG, qui lient leur destin à une organisation affaiblie mais nettement plus puissante qu’eux (60.000 membres contre 8.000), qui n’a rien d’ouvrier, et dont l’appareil est confortablement installé dans la gestion des affaires à l’Est, attaché à la défense de l’Etat bourgeois.

La carte représentant les scores de die Linke montre combien le parti reste davantage implanté à l’Est : les scores les plus importants à l’Ouest notamment dans la Sarre et quelques grandes villes sont inférieurs à tous les scores enregistrés à l’Est. Même à Berlin, la situation est tranchée entre les deux anciens secteurs de la ville (inférieur à 10% dans ce qui était Berlin-Ouest, contre 25 à 35% à Berlin-Est).

 

Le rôle politique de Die Linke, assigné par Lafontaine et le PDS est clair : il s’agit de prévenir et de dévoyer tout irruption des masses sur la gauche du SPD, tant à l’Ouest qu’à l’Est. Die Linke a ainsi réussi à canaliser nombre de groupes dits « d’extrême-gauche », issus ou non de la 4ème Internationale, qui sont venus dans die Linke, notamment à l’Ouest, et se sont bureaucratisés dans les appareils locaux… avant de mieux refluer compte-tenu des contradictions implacables sur lesquelles l’organisation est bâtie.

Le reflux électoral de Die Linke, malgré la paupérisation d’une partie du prolétariat allemand et la faiblesse du SPD, la persistance de scores tranchés entre l’Est et l’Ouest, même à Berlin, démontrent malheureusement la réussite de Lafontaine dans le dévoiement et la division du prolétariat allemand.

Quelle perspective politique pour le prolétariat allemand ?

 

Le prolétariat allemand, par son histoire, son importance, et par la place qu’il occupe, joue un rôle central en Europe. Malgré des mobilisations sans précédent (grèves sauvages brisant la cogestion chez Daimler et Opel, manifestation massive des étudiants avec occupation d’université contre l’introduction de frais de scolarité, Montagsdemo…) les défaites enregistrées durant la décennie 2000 se sont répercutées sur l’ensemble du continent – en France comme dans les autres pays - et a fragilisé l’ensemble des travailleurs européens dans la défense de leurs acquis.

Le prolétariat allemand apparait aujourd’hui profondément divisé : d’une part les travailleurs qualifiés travaillant dans les grandes industries exportatrices et couverts par des conventions de branche continuent de bénéficier de conditions appréciables ; d’autre part, les travailleurs peu qualifiés et travaillant dans les services ont subi de plein fouet les réformes et la paupérisation. Cité dans Libération le 30 juillet 2013, un ouvrier de l’imprimerie travaillant hors convention résume amèrement la situation : «Les conventions collectives, c’est la noblesse du prolétariat ! (…) Ce sont les employés de Volkswagen, qui touchent 7 000 euros de primes en fin d’année pour que le patron reçoive tous ses millions sans résistance ! ».

Aujourd’hui, à peine plus de 50% des travailleurs à l’Ouest bénéficient d’une convention de branche (ils étaient encore 70% en 1996), et seulement un peu plus d’un tiers à l’Est – or les conventions de branche rassemblent la plus grande partie des acquis du prolétariat allemand. Et la situation est pire encore pour les travailleurs immigrés, notamment pour les nombreux travailleurs originaires d’Europe de l’Est.

La question de l’introduction d’un salaire minimum généralisé en Allemagne, largement évoquée durant la campagne, revêt à ce titre un rôle fondamental pour mettre fin aux salaires de misères.

Mais il est symptomatique des contradictions qui traversent les organisations ouvrières allemandes. Traditionnellement, les appareils syndicaux en rejetaient le principe, car un salaire minimum mettait en cause la cogestion, « l’autonomie tarifaire » des conventions négociées paritairement auxquels la bureaucratie syndicale était fondamentalement attachée. Face à l’explosion des bas salaires, les directions syndicales puis celle du SPD se sont finalement ralliées au principe d’un salaire minimum de 8,50€ brut de l’heure (9,43€ en France).

Mais au-delà du principe, si jamais un salaire minimum devait voir le jour (ce qui est douteux tant cela serait potentiellement ravageur pour les profits de toute une partie de la bourgeoisie allemande – le gouverneur de la Bundesbank, Jens Weidmann, a déjà appelé à le rejeter catégoriquement), les conditions de mise en œuvre ne seront pas neutres pour le prolétariat. La CDU/CSU, historiquement opposé à tout salaire minimum, propose déjà ses propres solutions afin de désamorcer cette revendication centrale pour le prolétariat. Les partis bourgeois proposent d’instaurer un salaire minimum par branche, divisant les travailleurs, isolant les moins organisés et susceptible d’être négocié en l’échange d’autres contreparties. Le risque est réel de troquer un salaire minimum utile, mais d’un niveau peu élevé, contre une nouvelle dégradation de l’ensemble des autres acquis qui se traduirait par une mise en cause des conventions collectives de branche. Cela montre bien comment il est vital pour le prolétariat, en Allemagne comme ailleurs, de défendre des revendications qui unifient les travailleurs et renforcent l’unité de la classe.

 

L’impérialisme allemand est actuellement triomphant, et la victoire de Merkel en est le plus fidèle témoignage. Mais derrière ce score, les fragilités de la bourgeoisie allemande n’ont pas disparu, alors que la question européenne devrait rester explosive dans les mois à venir. La division des partis, aggravée par l’irruption d’AFD, risque de rendre le pays ingouvernable. Déjà, le Bundesrat, la chambre haute du Parlement, est quasiment privé de majorité compte tenu de la multiple configuration des alliances au niveau régional (9 coalitions différentes pour 16 Länder !). Les élections régionales en Hesse (région de Francfort), qui se sont déroulées le même jour que les élections fédérales, ont une nouvelle fois abouti à l’absence d’une majorité claire.

 

Le Bundesrat, la chambre haute du Parlement, est constitué des représentants directs des coalitions régionales. A l’inverse de la CDU, actuellement minoritaire, le SPD est présent dans la majorité des gouvernements régionaux, mais ses voix sont neutralisées dans les 5 régions gouvernées par des grandes coalitions CDU/SPD.

Mais même un accord entre SPD et CDU ne suffit pas: aucune majorité n’est possible sans y ajouter l’apport des voix du FDP ou des Verts !

 

 Pour un rassemblement de la classe ouvrière contre la classe bourgeoise

 

Dans cette situation, la classe ouvrière allemande pourrait tirer parti d’éventuelles dissensions au sein de la bourgeoisie pour tenter de surgir sur son propre terrain de classe. Mais la division des organisations ouvrières apparaît pour l’heure insurmontable tant la trahison du SPD comme l’opportunisme de Die Linke font de ces deux organisations de véritables repoussoirs.

Le Front unique ouvrier doit se réaliser sur la base des seules revendications ouvrières à même d’unifier le prolétariat et impulser une mobilisation :

  • L’abrogation de toutes les réformes Schröder et Merkel sur les contrats de travail (suppression des mini-jobs), sur l’assurance-chômage, sur la réforme de la santé et la retraite !
  • L’instauration d’un salaire minimum interprofessionnel qui s’impose à tous les patrons !
  • L’extension des conventions à tous les travailleurs de toutes les branches !

Sur cette base la classe ouvrière doit imposer aux partis d’origine ouvrière :

  • la rupture avec l’héritage Schröder et avec toute coalition entre le SPD et les partis bourgeois (CDU/CSU/FDP/AfD);
  • la rupture de la cogestion des organisations syndicales avec le patronat ce qui nécessite d’abroger les lois qui l’organisent ;

Dans ce mouvement, les travailleurs allemands auront à éjecter la bureaucratie dans toutes ses composantes (la bureaucratie syndicale « cogestionnaire » avec le patronat comme les débris de l’ex-bureaucratie stalinienne).

 

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