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Pour la construction d’un Parti Ouvrier Révolutionnaire et d’une Internationale Ouvrière Révolutionnaire

Publié le par Groupe Révoltes
Publié dans : #CGT
La CGT tiendra son 50ème Congrès du 18 au 22 mars 2013 à Toulouse. Depuis le précédent congrès des faits majeurs sont intervenus en France et ont modifié la situation politique : la mobilisation en 2010 contre le projet de réforme des retraites et l’élection d’Hollande pour ne citer que ceux-ci.

Les travailleurs, impuissantés par les appareils bureaucratiques syndicaux, n’ont pas pu, par leur seule mobilisation, chasser Sarkozy du pouvoir. Ils ont utilisé dans le cadre bonapartiste des élections présidentielles de la Vème  République, le bulletin de vote PS pour virer Sarkozy puis, aux législatives de juin, pour chasser l’UMP du pouvoir et mettre en place une majorité de députés du PS et du Front de Gauche à l’Assemblée Nationale. Ils n’ont pas voté pour le programme du PS mais contre celui de l’UMP. Dans cette élection la confédération CGT a été contrainte, sous la pression, de ses adhérents d’appeler clairement à utiliser le bulletin de vote Hollande pour en finir avec Sarkozy.

Le PS et Hollande ne développent en rien une politique conforme à la défense des intérêts ouvriers : dans une situation économique où la crise perdure et précipite des centaines de milliers de travailleurs au chômage, ils prennent en charge la gestion de la société capitaliste et tentent de faire supporter les effets de la crise du système par les travailleurs. Ils poursuivent ainsi une politique de rigueur et mettent en cause jour après jour les acquis ouvriers : nouvelles attaques contre le Code du Travail et le CDI, poursuite des suppressions massives de postes de fonctionnaires et gel du point d’indice …

Mais, conscient que le vote des travailleurs exprimait un profond rejet de Sarkozy et de sa politique, le gouvernement Ayrault est obligé de changer de méthode : là où Sarkozy passait relativement en force, le PS a mis en place un dialogue social généralisé. Dès le mois de juillet 2012 il convoquait une conférence sociale pour poser sa méthode et son calendrier. Toutes les organisations syndicales ont accepté d’y participer au premier rang desquelles la CGT. L’objectif clairement affiché est de mettre en place une opposition non conflictuelle. Il s’agit en effet d’associer le plus étroitement possible les confédérations syndicales aux réformes du gouvernement. L’Accord National Interprofessionnel (ANI) est à ce sujet l’exemple parfait (voir l’article à ce sujet dans le présent Bulletin).

C’est dans ce cadre que s’ouvre le 50ème congrès de la CGT.

L’appareil réformiste, toujours soucieux de ne pas entraver la bonne marche du système capitaliste et donc de ne pas nuire à la politique du gouvernement, est une fois de plus à la manœuvre pour tromper les travailleurs. Il s’agit pour lui de gommer tout l’enjeu de la situation et pour cela de falsifier l’histoire des luttes de classes récentes de 2010.

Rapport d'activité : quand l’appareil se dédouane de ses responsabilités !

Aucun réel bilan de la lutte sur les retraites (fin 2010) n’est tiré et pour cause ! Cette lutte majeure est à peine évoquée dans le texte alors même que 2013 sera une nouvelle année de "réforme" du régime des retraites ...

Les travailleurs très fortement mobilisés sont descendus par millions dans les rues pour réclamer le retrait du projet d’allongement du départ à la retraite. Mais l’appareil de la CGT n'a pas voulu reprendre ce mot d'ordre. Après avoir discuté pendant des mois avec le Medef et les représentants du gouvernement dans le cadre du COR pour aboutir à un diagnostic partagé, face à l’ampleur de la mobilisation, la direction confédérale a tout mis en œuvre pour protéger le projet du gouvernement : multiplication des journées d’action saute-mouton, refus de centraliser le combat, à partir des blocages et occupations des raffineries notamment, contre toute la politique du gouvernement, dans la perspective de le chasser du pouvoir par la mobilisation des travailleurs.

Document d'orientation : toujours aucune revendication ouvrière avancée !

Après la falsification historique, l’appareil doit boucher autant que faire ce peut toute perspective de mobilisation. Ainsi il s’acharne à ne présenter dans le document d’orientation aucune revendication ouvrière sérieuse. Nous prendrons trois exemples pour éclairer nos propos.

A l’heure où par sa participation aux négociations avec le Medef la CGT a permis que la CFDT, flanquée de la CGC et CFTC, signe l’ANI, le document d’orientation soumis au vote des délégués escamote la revendication de l’interdiction des licenciements et l’exigence d’un seul contrat de travail pour tous (le CDI) derrière la « revendication » du statut du travailleur salarié, la transmission des droits tout au long de la carrière, même en cas de changement de travail. La sécurisation des parcours professionnels, de la portabilité des droits, comme repris par l’accord ANI, dédouane en réalité totalement le patron de sa responsabilité de prise en charge du risque de chômage, de la formation professionnelle, … Cette responsabilité se traduit par le versement de cotisations sociales.

A l’heure où une nouvelle remise en cause du régime des retraites est à l’ordre du jour en 2013, le document d’orientation ne reprend pas la revendication du retour aux 60 ans et 37,5 annuités pour tous pour une retraite à taux plein ! La responsabilité de la CGT c’est de se prononcer contre toute remise en cause du régime de retraite, du maintien de l’indexation des pensions. La défense de la retraite des travailleurs est incompatible avec la participation de la CGT au COR, dont le but est de proposer des réformes pour gérer la crise.

A l’heure où avec la MAP (Modernisation de l’Action Publique) le gouvernement poursuit la RGPP de Sarkozy, les revendications des fonctionnaires sont totalement absentes du document : arrêt immédiat des suppressions de postes et remplacement de tous les départs à la retraite, rattrapage du pouvoir d’achat perdu par augmentation du point d’indice …

Mais l’appareil ne s’en tient pas là. Il s’agit pour lui d’adapter les structures du syndicat aux toutes prochaines exigences du patronat.

Modifications statutaires et annexe sur les « règles de vie » : des réorganisations de structures lourdes de conséquence

La poursuite de la crise économique exacerbe les rivalités inter-impérialistes. Chaque bourgeoisie doit redoubler d’efforts pour gagner des parts de marché. La bourgeoisie française doit imposer ses revendications pour faire baisser la valeur de la force de travail et accroître la flexibilité pour plus de facilités pour licencier. Le Medef a besoin de concasser, d’individualiser la classe ouvrière afin d’éviter les mobilisations collectives. Aujourd’hui, les structures syndicales organisent les travailleurs par métiers et par branches afin de permettre un combat d’ensemble pour la défense des conventions collectives.

Un des besoins du patronat français est d’en finir avec ce type d’organisation.

L’appareil confédéral a bien compris ce besoin et sous prétexte d’adapter ses structures syndicales à une réalité du terrain où cohabitent sur un même bassin d’emploi des petites entreprises de diverses branches, il entendait dès le 49ème congrès mettre en place des syndicats de site, de bassin d’emploi … Le débat n’avait pas pu être tranché à l’époque mais par endroit de telles structures ont quand même vu le jour. Aujourd’hui l’appareil propose des modifications statutaires et le vote d’une annexe sur les « règles de vie » pour modifier la structuration et le fonctionnement de toute la CGT. Là encore l’appareil camoufle ses intentions : la manière dont ces changements ont été introduits pose problème.

Lors du CCN des 6 et 7 novembre, de nombreuses interventions s’étaient opposées au projet présenté à l’époque par Philippe Lattaud au nom du Bureau Confédéral. L’opposition avait été telle que Philippe Lattaud, membre de la CE confédérale, rapporteur de la commission modification des statuts, a conclu le débat : « Le CCN mandate la commission et la CE confédérale pour garder les mises à jour indispensables et éliminer ce qui reste à débattre. » Cette conclusion faisait suite à de nombreuses interventions. Ainsi on pouvait lire dans Le Peuple : «… mettre dans nos statuts des annexes revient à faire de celles-ci des règles statutaires ».Patrick Picard, de l’UD de Paris. [Les propositions évoquées vont] « Plus loin qu’un simple toilettage », et « il est dommage de les présenter comme une simple actualisation ». Selon Le Peuple Valérie Lesage, de l’UD 77: « Elle dit craindre, sur certains points, une hiérarchisation des organisations de la CGT, notamment à l’encontre du syndicat. » Et elle conclut en évoquant la nécessité de ne pas donner l’impression « que ce que l’on n’a pas réussi à faire après le 49e Congrès, on le fasse entrer de force dans les statuts. ».

En conséquence, la CE Confédérale du 13 novembre acte : « la CEC a pris en compte les débats du CCN des 6 et 7 novembre. Elle a décidé de limiter les modifications des statuts aux chapitres nécessitant une modification réglementaire (nouvelle norme comptable) liée à l’application du système des règlements des cotisations (Cogétise), ou pour lever des ambiguïtés d’ordre juridique ». Et de conclure « Au-delà des modifications soumises aux voix du Congrès, d’autres points feront l’objet d’un questionnement aux syndicats ».

Mais, la CE Confédérale de décembre a adopté des propositions de modification des statuts qui constituent un véritable bouleversement. Ainsi, elle ajoute l’article 7-0 qui fait référence à une annexe « sur les règles de vie ». Cette proposition indique : « Les dispositions de ce titre sont précisées par l’annexe sur les règles de vie au sein de la CGT adoptée par le Congrès confédéral. L’affiliation d’une organisation à la CGT implique son adhésion aux présents statuts. » Avec ce commentaire : « Il s’agit d’introduire dans cet article la référence aux règles de vie annexées aux statuts. »

Cette annexe devient donc un élément des statuts de la confédération et s’impose donc au même titre.

Elle définit la création de syndicat sur la base d’un périmètre, notion à géométrie variable, et de moins en moins sur la base d’une fédération ou à niveau territorial (UL ou UD). Or, la constitution du syndicat sur la base de fédérations permet la défense des conventions collectives. C’est comme si la confédération s’alignait sur les réformes du marché du travail en cours.

Succession à la CGT : l’heure du changement ? ? ?

A l’occasion de la succession de Bernard Thibault à la tête de la CGT, Le Monde revient sur les mandats de B. Thibault dans un article intitulé : « la CGT sous Bernard Thibault un recentrage réformiste non abouti ». Le journal bourgeois ne tarit pas d’éloges et rend hommage à sa façon à celui qui par la stratégie – "Bouger la CGT" – a voulu mettre en œuvre au cours de ses quatre mandats « un recentrage réformiste non assumé et inachevé. Il s'est heurté à un appareil réticent à s'adapter ».

Il suffit en effet de citer les lignes du quotidien, les commentaires sont superflus :

« Alors que M. Viannet avait fait entrer la CGT à la Confédération européenne des syndicats (CES), M. Thibault a participé à la recomposition du syndicalisme mondial, en faisant adhérer sa centrale à la Confédération syndicale internationale (CSI), créée le 1er novembre 2006, d'inspiration réformiste.

Soucieux de montrer l'utilité d'un syndicalisme apportant des résultats, y compris en se battant pour "des réformes immédiates ", M. Thibault a réhabilité la négociation ou, plus exactement "des pratiques de négociation pour le progrès social". En 2006, le congrès de Lille a adopté le principe que "la négociation a pour vocation d'améliorer la situation des salariés, de créer ou d'élargir leurs droits, d'empêcher l'employeur de faire ce qu'il veut". Le compromis est encore un gros mot mais, en 2010, 85 % des accords d'entreprise ont été signés par la CGT.

Élu en 1999 en pleine cohabitation M. Thibault a conclu des "deals" avec Nicolas Sarkozy, notamment lors du conflit sur les régimes spéciaux de retraite fin 2007. Cette apparente entente a facilité la réforme de la représentativité syndicale en 2008, conquise avec la CFDT. Paradoxalement, ce succès a débouché sur une rupture avec M. Sarkozy, celui-ci tentant alors de mettre en cause, par une entourloupe, les 35 heures. Le conflit des retraites en 2010 a parachevé le divorce, amenant M. Thibault à faire campagne contre la réélection de M. Sarkozy. (…)

M. Thibault a aussi subi des échecs. La transformation des structures, avec des fusions de fédérations ou des "syndicats de site" multiprofessionnels, est en panne. Mis en minorité, en février 2005, par son comité confédéral national sur le référendum européen, pour lequel il refusait que la CGT donne une consigne de vote, M. Thibault a été humilié.

Ha le bel hommage ! Ce qui est certain c’est qu’il va être regretté mais par qui ? ? ?

Et, n’en doutons pas, son successeur, Thierry Le Paon, sera du même tonneau. Déjà connu (et reconnu par les représentants de la bourgeoisie) pour son adhésion totale à la politique confédérale de négociation il poursuivra la transformation de la centrale sur la base de l’orientation et des nouveaux statuts issus du 50ème congrès.

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